27 juin 2025

Santé des femmes au travail : l’angle mort de vos politiques de prévention ?


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Alors que les femmes représentent  la moitié de la population active, leur santé au travail reste encore un sujet largement sous-estimé, voire ignoré dans de nombreuses entreprises. Pourtant, les chiffres sont sans appel : elles sont plus exposées aux troubles musculo-squelettiques, à la souffrance psychique, à certains cancers liés aux conditions de travail… tout en étant confrontées à des enjeux de santé spécifiques comme la grossesse, l’endométriose, l’AMP ou la ménopause, rarement pris en compte dans les politiques de prévention.

Le rapport du Sénat (1) « Santé des femmes au travail : des maux invisibles » publié en 2023 a mis en lumière cette réalité inquiétante : les normes de prévention, les outils d’évaluation des risques et même les équipements restent majoritairement pensés pour un profil masculin.

Les femmes, qui occupent des postes précaires aux risques physiques et émotionnels “invisibles”, sont donc aussi les premières victimes d’une prévention en santé inadaptée.

Alors que les enjeux de bien-être au travail et d’égalité professionnelle sont au cœur des stratégies RH et QVCT, continuer à ignorer la santé des femmes au travail, c’est passer à côté d’un pan essentiel de la prévention, au détriment de la santé de la moitié des salariés.

Quels sont les risques spécifiques auxquels les femmes sont exposées ? Et surtout, comment agir concrètement au sein de son entreprise pour préserver leur santé ? Autant de questions auxquelles nous répondrons dans cet article.

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Des inégalités persistantes en matière de santé pour les femmes

Troubles musculo-squelettiques (TMS), charge mentale, souffrance psychique, cancers liés au travail : les femmes sont particulièrement exposées à des risques professionnels qui restent largement sous-évalués. Voici quelques chiffres :

  • Selon une étude de l’ANACT (2), entre 2001 et 2019, les accidents du travail ont diminué de 27 % chez les hommes… mais ont augmenté de 42 % chez les femmes, notamment car elles sont majoritaires dans les secteurs du soin, du nettoyage, de l’action sociale ou du travail temporaire.
  • Les TMS représentent la première cause de maladie professionnelle en France (3), et concernent majoritairement les femmes : 60 % des personnes atteintes sont des salariées (1).
  • Santé publique France (4) révèle également que la souffrance psychique en lien avec le travail est deux fois plus élevée chez les femmes que chez les hommes (6 % contre 3 %).

Une prévention pensée pour les hommes

Une grande partie des outils de prévention en entreprise sont encore conçus sur la base d’un modèle masculin standardisé : l’“homme moyen”. Cela concerne aussi bien les équipements de protection individuelle que l’aménagement des postes de travail ou l’organisation des horaires.

Les femmes ont pourtant des caractéristiques physiologiques spécifiques (morphologie, masse musculaire, élasticité des tendons, cycle hormonal…) qui modifient leur exposition au risque. Elles exécutent donc souvent les mêmes tâches que leurs collègues masculins, mais dans des conditions moins favorables, ce qui augmente leur vulnérabilité à certains troubles.

Pourtant, l’un des principes fondateurs de la prévention en santé au travail est d’adapter le travail à l’humain, en prenant en compte les différences interindividuelles, dont le sexe et le genre font pleinement partie.

À cela s’ajoute une difficulté structurelle : malgré l’obligation légale introduite par la loi santé au travail du 4 août 2014, très peu d’entreprises intègrent une analyse différenciée des risques entre femmes et hommes dans leur Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP). Par crainte d’être accusées de discrimination, beaucoup évitent d’aborder ces différences, au risque de les ignorer totalement.

Un manque de reconnaissance institutionnelle

Sans données fiables, pas de prévention efficace. Et sur ce plan, la situation est encore très insuffisante. De nombreux organismes publics (comme la CNAM ou la DGT) ne collectent pas ou n’exploitent pas systématiquement des données par sexe. Les pathologies spécifiques aux femmes restent peu étudiées, notamment dans les secteurs très féminisés comme le soin ou le nettoyage.

Par ailleurs, plusieurs maladies à caractère professionnel sont encore très mal reconnues lorsqu’elles touchent majoritairement les femmes (ou sous-déclarées par les salariées elles-mêmes).

Par exemple, alors qu’1 femme sur 10 est concernée par l’endométriose (5), tous les soins et arrêts liés à cette maladie ne sont pas systématiquement pris en charge à 100% (contrairement au diabète par exemple).

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L’empreinte du travail sur la santé des femmes

1. L’usure physique

Les femmes sont fortement touchées par les troubles musculo-squelettiques (TMS). Près de 60 % âgées de 18 à 64 ans déclarent souffrir de TMS du dos ou des membres supérieurs (1).

De plus, les postes de travail et les équipements sont généralement pensés pour un gabarit masculin. Pourtant, la taille, la masse musculaire, la souplesse articulaire ou encore l’élasticité des tendons diffèrent entre les sexes, ce qui signifie qu’ils n’exécutent pas les tâches de la même manière (5).

Les femmes sont également surreprésentées dans les maladies professionnelles liées aux substances toxiques.

Selon le médecin du travail Guy Pons, « Les femmes pourraient être plus vulnérables à certains produits cancérigènes en raison de différences biologiques et métaboliques, hormonales et de comportements d’exposition » (6).

Pourtant, ces différences sont rarement prises en compte dans l’évaluation des risques ou des conditions de travail.

2. L’usure psychique

L’exposition aux risques psychosociaux montre aussi des inégalités entre hommes et femmes. Les femmes sont majoritaires dans les métiers à forte charge émotionnelle (soins, éducation, administration…), souvent exercés avec peu de reconnaissance et dans des conditions précaires.

En conséquence, la souffrance psychique liée au travail touche deux fois plus de femmes que d’hommes (4).

Les temps partiels subis, les horaires atypiques (nuit, week-ends, horaires coupés) et la double charge domestique pèsent lourd sur la santé mentale.

Les femmes cumulent ainsi des risques invisibles (mais bien réels !), souvent ignorés dans les politiques de prévention classiques. Cette usure silencieuse mène pourtant à des burn-outs, à des arrêts de travail fréquents, voire à des ruptures avec l’emploi.

3. Santé reproductive : des enjeux ignorés

La santé reproductive des femmes reste un angle mort important en entreprise. Endométriose, grossesse, ménopause, assistance médicale à la procréation (AMP)… sont autant d’étapes de vie qui interfèrent avec leur vie professionnelle.

  • La grossesse fait toujours l’objet d’une stigmatisation au travail. Selon le rapport du SENAT, 20 % des femmes dans des emplois ouvriers ou de service perdent ou quittent leur poste pendant leur grossesse (1).
  • La ménopause, qui touche 500 000 femmes chaque année en France reste un sujet tabou dans le monde du travail, alors qu’elle provoque des symptômes physiques et cognitifs importants (fatigue, bouffées de chaleur, troubles du sommeil, troubles de la concentration…).
  • Enfin, les parcours d’AMP (procréation médicalement assistée) concernent de plus en plus de femmes, mais 84 % déclarent que cela a des répercussions sur leur vie professionnelle, faute d’adaptations suffisantes.

Le saviez-vous ?

Selon l’Inserm, le travail de nuit augmenterait de 26% le risque de développer un cancer du sein (7).

Santé féminine : Comment mieux prévenir les risques en entreprise ?

Face à ces constats sur la santé des femmes au travail, les entreprises ont un rôle central à jouer. Voici plusieurs pistes pour adapter ses politiques de prévention :

1. Intégrer une approche genrée dans la politique de santé et sécurité

Le premier levier fondamental consiste à prendre en compte le genre dans l’évaluation des risques professionnels. Aujourd’hui encore, la plupart des DUERP sont neutres sur le plan du sexe… ou plutôt, pensés par défaut pour un salarié masculin. Pourtant, depuis la loi du 4 août 2014, les entreprises ont l’obligation légale d’inclure une approche par sexe dans cette analyse.

Concrètement, cela implique de :

  • Croiser les données par sexe (exposition aux risques, fréquence des arrêts, accidentologie),
  • Identifier les risques spécifiques aux femmes (TMS, RPS, exposition aux produits, contraintes physiologiques),
  • Et surtout, adapter les plans d’action de prévention en conséquence.

Cette démarche suppose également la formation des professionnels impliqués : médecins du travail, responsables RH, managers… Les recommandations du rapport du Sénat préconisent une généralisation de cette approche genrée dans tous les niveaux de décision en santé au travail (1).

2. Adapter les conditions de travail aux femmes

Adapter les postes et les conditions de travail aux femmes permet de réduire l’usure physique et psychique, tout en améliorant l’inclusivité.

Quelques exemples de mesures concrètes :

  • Repenser l’ergonomie des postes en fonction des morphologies féminines : hauteur des plans de travail, outils adaptés…
  • Utiliser des équipements spécifiquement conçus pour les femmes, dans les secteurs à forte contrainte physique.
  • Prévoir des aménagements individuels liés à certaines pathologies ou étapes de vie : horaires flexibles, télétravail, postes adaptés pendant la grossesse, la ménopause, en cas d’endométriose…

Il s’agit d’offrir des conditions équitables pour préserver la santé de toutes et tous, à partir de réalités différentes.

3. Faire de la prévention un pilier de la culture d’entreprise

Au-delà de ces aspects, c’est la culture d’entreprise qui doit évoluer. Trop souvent, les sujets liés à la santé féminine sont encore tabous, mal compris, voire évités. Or, la prévention ne peut être efficace que si elle repose sur un climat de confiance.

L’entreprise peut agir à plusieurs niveaux :

  • Organiser des temps de sensibilisation, à destination des salariés et des managers.
  • Ouvrir le dialogue avec les salariées concernées, en collaboration avec les services de santé au travail, pour mieux cerner les besoins d’adaptation.
  • Intégrer ces enjeux dans la stratégie RSE et les politiques QVCT comme des indicateurs forts d’engagement.
  • Associer les représentants du personnel (CSE, référents égalité, diversité…) dans la réflexion et les actions de terrain.

Ces changements ne profitent d’ailleurs pas uniquement aux femmes ! Ils permettent d’améliorer la santé globale des salariées, le bien-être, l’inclusion et la performance collective.

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Sources : 

  1. Sénat – Délégation aux droits des femmes. Santé des femmes au travail : des maux invisibles. Rapport d’information n° 780 (2022-2023), publié le 28 juin 2023.
  2. ANACT – Photographie statistique de la sinistralité au travail en France selon le sexe entre 2001 et 2019. – Juin 2022
  3. Santé publique France – Maladies liées au travail. (2 juillet 2019). https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-liees-au-travail
  1. Santé publique France – Des inégalités de santé persistantes entre les femmes et les hommes. https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2024/des-inegalites-de-sante-persistantes-entre-les-femmes-et-les-hommes
  1. PÔLE SANTÉ TRAVAIL. (7 mars 2025). La santé au travail au féminin : en prendre conscience et agir en prévention. https://www.polesantetravail.fr/la-sante-au-travail-au-feminin-en-prendre-conscience-et-agir-en-prevention/
  1. De Senneville, C. (2024, 14 juin). Santé des femmes : des risques invisibilisés. DECIDEURS MAGAZINE https://www.decideurs-rh.com/engagements-societaux-et-qvct/58506-sante-des-femmes-des-risques-invisibilises.html
  2. Inserm – Travail de nuit et cancer du sein : de nouveaux arguments en faveur d’un lien. https://www.inserm.fr/actualite/travail-nuit-et-cancer-sein-nouveaux-arguments-en-faveur-lien/

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